Jé 20, 14
Maudit sois le jour où je suis né ! Que le jour où ma mère m'a enfanté Ne soit pas béni !
[1]
Après cela, Job ouvrit la bouche et maudit le jour de sa naissance. [2]
Il prit la parole et dit : [3]
Périsse le jour où je suis né, Et la nuit qui dit : Un enfant mâle est conçu ! [4]
Ce jour ! qu'il se change en ténèbres, Que Dieu n'en ait point souci dans le ciel, Et que la lumière ne rayonne plus sur lui ! [5]
Que l'obscurité et l'ombre de la mort s'en emparent, Que des nuées établissent leur demeure au-dessus de lui, Et que de noirs phénomènes l'épouvantent ! [6]
Cette nuit ! que les ténèbres en fassent leur proie, Qu'elle disparaisse de l'année, Qu'elle ne soit plus comptée parmi les mois ! [7]
Que cette nuit devienne stérile, Que l'allégresse en soit bannie ! [8]
Qu'elle soit maudite par ceux qui maudissent les jours, Par ceux qui savent exciter le léviathan ! [9]
Que les étoiles de son crépuscule s'obscurcissent, Qu'elle attende en vain la lumière, Et qu'elle ne voie point les paupières de l'aurore ! [10]
Car elle n'a pas fermé le sein qui me conçut, Ni dérobé la souffrance à mes regards. [11]
Pourquoi ne suis-je pas mort dans le ventre de ma mère ? Pourquoi n'ai-je pas expiré au sortir de ses entrailles ? [12]
Pourquoi ai-je trouvé des genoux pour me recevoir, Et des mamelles pour m'allaiter ? [13]
Je serais couché maintenant, je serais tranquille, Je dormirais, je reposerais, [14]
Avec les rois et les grands de la terre, Qui se bâtirent des mausolées, [15]
Avec les princes qui avaient de l'or, Et qui remplirent d'argent leurs demeures. [16]
Ou je n'existerais pas, je serais comme un avorton caché, Comme des enfants qui n'ont pas vu la lumière. [17]
Là ne s'agitent plus les méchants, Et là se reposent ceux qui sont fatigués et sans force ; [18]
Les captifs sont tous en paix, Ils n'entendent pas la voix de l'oppresseur ; [19]
Le petit et le grand sont là, Et l'esclave n'est plus soumis à son maître. [20]
Pourquoi donne-t-il la lumière à celui qui souffre, Et la vie à ceux qui ont l'amertume dans l'âme, [21]
Qui espèrent en vain la mort, Et qui la convoitent plus qu'un trésor, [22]
Qui seraient transportés de joie Et saisis d'allégresse, s'ils trouvaient le tombeau ? [23]
A l'homme qui ne sait où aller, Et que Dieu cerne de toutes parts ? [24]
Mes soupirs sont ma nourriture, Et mes cris se répandent comme l'eau. [25]
Ce que je crains, c'est ce qui m'arrive ; Ce que je redoute, c'est ce qui m'atteint. [26]
Je n'ai ni tranquillité, ni paix, ni repos, Et le trouble s'est emparé de moi.